jeudi 07 septembre 2006

Le Monde Des Grands

Bienvenue dans le monde des grands et marche droit petit con, marche droit. Ici, tes rêves, comme tu le dis si bien ne sont que des rêves alors oublie-les, vite, ici tu es dans notre réalité, le monde qu'on se partage ne laisse pas de place à tes rêves. Pose tes jouets, bordel, pose tes jouets, il faut travailler et même plus, il faut donner ce que tu n'as pas. Allonge-toi pour dormir, le moins possible ou pour pleurer, mais ne le montre pas. Tais-toi. Retourne travailler et achète, si tu n'en as pas le temps, dors moins et continue. Souris, montre que tu vas bien et que tu es heureux, continue, tu commences à affiner ton pas, on dirait que tu marches droit. Ce cadre que tu vois tout autour de ta vie, certains l'ont dépassé, vois comme ils sont malheureux, comme ils souffrent de la maladie, de la faim et du manque de dignité. Tu les vois partout, mendier, supplier et mourir de froid. Réfléchis bien si l'idée de dépasser ce cadre venait à germer dans ton esprit civilisé.

Marche droit, paye toutes tes factures sans délai, si tu ne peux pas les payer, travaille plus et prend sur ton temps libre, sur ton sommeil, les loisirs ne sont qu'une part de tes rêves alors oublie-les eux aussi et ne perd plus ton temps à te plaindre car personne ne t'entend. Ici ce n'est pas un jeu mais il y a des règles, il faut que tu possèdes, plus que les autres, plus que tout le monde car seulement ce que tu possèdes te définit en tant que grand. Tu dois être grand. Si tu n'arrives pas à être grand par toi-même, trouve un moyen différent, emprunte et laisse-toi abuser car ça non plus ça ne se voit pas, beaucoup ont pour désir d'abuser de toi. Entre dans la danse qui n'a rien d'harmonieux. Cesse de prier car personne ne t'entend mais demande, à voix basse, demande la marche à suivre à ceux qui filent droit, à ceux qui sont ce que tu aspires à devenir, et à rester. Car le tout n'est pas de devenir ce que nous avons prévu pour toi. Une fois partant dans la bonne direction, nous te suivrons encore et te rappellerons chaque faux pas. Il ne te suffira pas de marcher droit mais de courir.

Quand enfin, à force de marche, tu auras enfin acquis la capacité de courir, alors tu n'auras plus besoin de réfléchir à ta destination. La vitesse de ta course te conférera l'illusion d'une liberté que nous t'indiquons de chérir.

Quand, à bout de souffle, tu auras couru tant de temps dans la bonne direction, viendra un moment où tu te poseras, une ultime fois. Tu regarderas derrière toi, tu y verras la ligne de ta vie creusée dans la poussière des corps qui l'ont façonnée pour qu'un jour tu t'y épuises à ton tour... Repose-toi, une dernière fois. Encore un souffle. Encore un. Juste un dernier. Merci d'être passé dans le monde des grands.